jeudi 20 septembre 2007

"La Belgique est-elle encore une démocratie ?" Non, peut-être? Et la France?

Jean Quatremer ose cette intervention dans les commentaire de son article intitulé : La Belgique est-elle encore une démocratie ? :

"Atous: la question du rattachement de la Wallonie à la France agite plusieurs d'entre vous. Voici mon opinion, pour ce qu'elle vaut: la Belgique n'existe que parce qu'elle réunit la Flandre et la Wallonie (la francisation de Bruxelles étant un accident ;-)). Si la Flandre prend son indépendance, le mouvement en faveur d'un rattachement à la France sera inéluctable car il n'y a pas d'identité wallone: il y a des identités régionales mais pas wallone en tant que tel. C'est pour cela que les francophones sont tellement attachés à la Belgique. Prenons un autre exemple: si le Québec prenait son indépendance, le Canada anglais perdrait sa raison d'être et tout le monde en est conscient dans ce pays. Il ne s'écoulerait pas dix ans avant que les Etats-Unis s'étendent au nord... En plus, les francophones auront tout à gagner: un Etat qui fonctionne, des impôts sur le travail beaucoup plus bas, des retraites bien plus attrayantes, etc. Etre français, surtout aujourd'hui, ne veut pas dire que l'on renonce à sa spécificité.Cela étant, si la scission belge me paraît inévitable aujourd'hui, elle prendra encore quelques années. Tout comme le rapprochement de la Wallonie et de la France."
Je me permets de vous répondre longuement à cet avis que vous donnez et qui éclaire d’un jour nouveau vos billets. D’abord, sachez qu’il est définitvement erroné de dire que la Belgique « n’existe pas parce qu'elle réunit la Flandre et la Wallonie ». Si vous êtres convaincu de cela, c’est que vous avez été, comme beaucoup de mes compatriotes, un peu trop été influencé par la revisitation historique fait par les Flamands. Or, ces manipulations historiques sont monnaie courante des nationalistes de tous bords. Un journaliste comme vous a les moyens de prendre un peu de hauteur et de recul historique.
Je ne vais pas vous faire un cours, bien que je sois historienne, mais je peux au moins vous rappeler que depuis toujours la France (en tant que nation)n’a eu maille à partie avec la Belgique que durant une très brève période et c’est par l’envahissement, l’enrôlement de force de jeunes gens dans les armées napoléoniennes, le pillage des fonds culturels et religieux belges que tout cela s’est fait. Cette période très brève et pleine de souffrances est celle de la fin du 18ème siècle et a été rompue par le traité de Vienne, la période orangiste et définitivement par l’Indépendance de la Belgique. La plupart des duchés, comtés et autres entités qui composaient la Begiques ont eu un destin généralement commun, sous l’autorités de souverains étrangers ( espagnols, autrichiens, etc…) Les SEULS qui nous ont dominés de force sont les Français.Ce qui nous a apporté le Code Napoléonnien, ce qui n'est pas une moindre avancée, mais pour le reste....
Il y a une identité francophones, avec ses nuances bruxelloises et wallonnes, une histoire belge et en son sein des variances d’identités linguistiques. Nous avons nos artistes, nos écrivains, nos théoriciens, nos scientifiques, nos créateurs, nos entrepreneurs. Notre manière de concevoir la vie en entreprise est à mille lieues de celle des français qui prônent les hiérarchies fortes, notamment, contrairement aux belges qui travaillent par hiérarchies plates ( au Nord comme au Sud). Nous avons cent fois plus de points communs avec les Flamands qu’avec les français. Malgré toute l’immense sympathie que j’ai pour votre peuple, nous avons des différences inéluctables inscrites dans les gènes de notre Histoire.
Votre politique ( binaire et aussi antidémocratique ainsi qu’on a pu voir l’éviction d’un MODEM aux élections législatives pour raison de mode de calcul de scrutin réellement défavorable aux petits partis sans alliances…) , votre conception de la laïcité, votre organisation centralisatrice, votre suprématie du centre Parisien sur ses régions, etc… Rien ne correspond à notre manière de vivre. Ni nos acquis sociaux (la concertation sociale est à ses balbutiements démocratique en France par rapport à la référence que constituent les systèmes mis en place au Nord comme au Sud de mon pays). Les discriminations à l’emploi pour les étrangers sont cent fois plus graves en France. Et nous francophones de Belgique, on ne vote pas à 20 pour cent pour un parti d’extrême droite….
Alors, merci pour votre « état qui fonctionne » malgré ses incapacités à gérer son inflation, à rentrer dans le giron de l’Europe pour ces questions économiques, malgré ses renvois massifs d’immigrés aux frontières sur base de quotas prédéfinis, ses essais nucléaires et ses interventions va-t-en-guerre, ses insensés conflits d'égos au sein des partis, malgré ses banlieux incendiés pour cause de ghettoïsation, malgré la mainmise croissante de l’Etat sur la presse, malgré les habitude d’amnestier les autorités de l’Etat qui fraudent ou volent le peuple français, malgré tout cela. Vos retraites ne sont pas plus attrayantes, vos impôts sont plus bas, mais moi, je peux choisir mes médecins, être soignée à moindre coût partout, dans des hôpitaux de qualité sans attendre durant des mois ou faire cinq cent kilomètres pour des traitements de pointe, j’ai la chance de choisir pour mes enfants le type d’enseignement libre ou public que je veux, j’ai certes une grosse retenue salariale, mais selon tous les sondages, les Belges se sentent heureux, sont conscient qu’il possède une des meilleure protection sociale au monde ( et bien meilleure que celle de France ou d’Angleterre où vivent mes frères).
Je refuse d’aller vers une France qui me ferait perdre tous ces avantages qui sont l’apanage de l’esprit social et proche des préoccupations du peuple de mon pays. J’aime la France. C’est un pays varié, magnifique, soucieux de sa culture, et qui a l’immense avantage de nous ouvrir sur le monde par la proportion de francophones voisins qu’elle représente. Mais, on a décidément pas le même sens des réalités, ni le sens de l’humour ;-)(là, j'avoue, que je l'ai un peu perdu à vous lire).
Rien que l’idée de devoir voter pour un président entre une droite trop à droite et une gauche trop à gauche, de devoir se farcir ses guignoleries durant 5 ans et d’être considéré comme une sous-régions rapportées et pauvre d’un pays qui nous méprisera tout en s’attribuant le bénéfice de nos talents, je préfère mille fois vivre la situation actuelle que celle-là. Les Flamands au moins, parlent un même langage quand il s'agit des fondamentaux soci-économiques et quoi qu’ils ne veulent pas se l’avouer, ils parlent aussi un langage culturel bien plus commun au nôtre que celui de la France.
La seule très importante chose qui nous rapproche est la langue. Mais tandis que nous avons les meilleurs grammairiens de francophonie, vous imposer des réformes de l’orthographe à l’ensemble de la francophonie sous le prétexte, discutable, que vous êtes français et qu’éponymement cette langue vous appartient et que vous en constituez la référence. Vous n’êtes pas prêts à englober une nation. Nous ne pouvons qu’être de merveilleux voisins. Mais pas vivre sous les mêmes règles, ni les mêmes lois. Pour prendre un exemple parlant par rapport à votre actualité récente : on a pas le même ADN, on parle la même langue, mais on est pas de la même famille. Avec les flamands, au moins on a le même ADN, avec eux, on ne devra pas passer notre vie à expliquer des évidences fondamentales. On doit juste passer notre vie à supporter la montée du nationalisme, mais à bien y regarder, vous n’avez, français, aucune amélioration à nous offrir sur ce point.(cfr 21 avril 2001).
Ne le prenez pas mal surtout, j’apprécie les efforts que vous faites pour nous comprendre, mais vous juger trop vite. Soyez plus à l'écoute, vous apprendrez plus. Laissez tomber vos apriori, voyez au-delà, sur base de principes éthiques et démocratiques. Nos élections communales (municipales) sont un modèle de démocratie, la réforme a eu lieu récemment mais n’a fait qu’affiner un système déjà éprouvé. Nous savons évoluer. Que ne parlez-vous aussi de ces éléments-là ? Plutôt que d’asséner qu’on est pas démocratique, sous prétexte que vous le seriez davantage ? Aux dernières nouvelles, nous n’avons jamais jeté des dizaines d’algériens dans la Seine sans jamais poursuivre les auteurs ni même admettre le fait ainsi que la France l’a fait depuis le 17 octobre 1961…
( je sens que je déborde, pardonnez-moi encore...)
Vous avez le DROIT et même le DEVOIR en tant que voisin, au sein de l'Europe et journaliste de nous examiner et nous critiquer. Ces points de vue sont les bienvenus. Mais acceptez aussi la critique que l'on peut vous faire de mieux vous informer sur certains points. Un pays, ce n'est pas que deux langues et une clique de politiciens du moment. C'est bien plus large et profond que cela... Ca a droit a plus de respect qu'une annexion par le mépris de notre identité.

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